Urbanisme Transitoire Urban Attitude 2

L’urbanisme transitoire : la fabrique de la ville s’ouvre enfin au grand public

À l’heure du ralentissement de l’étalement urbain, la difficile question des friches immobilières trouve une réponse dans des implantations éphémères, qu’elles soient commerciales, culturelles ou à vocation sociale, phénomène que les experts qualifient d’urbanisme transitoire.

Les enjeux modernes de l’urbanisation tels que la prise de conscience de la nécessité du développement durable et l’importance du bien-être et de la qualité de vie font face à l’accumulation d’un héritage encombrant, celui des friches, qu’elles soient industrielles, commerciales ou institutionnelles. 

Le gaspillage foncier et la nuisance qu’elles occasionnent constituent un antagonisme évident aux préoccupations urbanistiques modernes, lequel se trouve aggravé par le fait qu’il est parfois extrêmement long de s’en débarrasser (15 ans en moyenne). D’où cette conception moderne d’urbanisme transitoire, à savoir l’occupation de ces espaces par des projets éphémères afin d’en atténuer l’impact négatif.

Le symptôme d’un urbanisme moderne, local et concerté

En trouvant une nouvelle utilité à des lieux vacants, l’urbanisme transitoire est l’héritier des squats des années 70, à cette différence près qu’il ne s’agit pas là d’un phénomène illégal mais consenti et concerté avec le propriétaire et les institutions locales. Le logement en est rarement la finalité, il s’agit plus souvent de projets à vocation culturelle, commerciale ou sociale. 

L’Institut d’aménagement et d’urbanisme (IAU) liste ses nombreux avantages dans une étude parue en 2018 et titrée “l’urbanisme transitoire : optimisation foncière ou fabrique urbaine partagée?”. Outre son faible coût, il permet d’éviter la dégradation et l’insalubrité du lieu et peut même le valoriser, le lien social local s’en trouve amélioré au lieu de se trouver détérioré par une “verrue” urbaine parfois sale et dangereuse comme notamment les usines désaffectées, les installations ferroviaires vétustes ou autres casernes abandonnées.

 Mais il est surtout symptomatique d’une conception nouvelle du développement de la ville. « L’urbanisme transitoire touche aujourd’hui les milieux institutionnels de l’aménagement après un long et lent processus permettant de passer d’un urbanisme très planificateur et top-down, dans la lignée de la reconstruction des grands ensembles, à un urbanisme plus local […] », selon l’IAU. Ces initiatives d’occupation donnent lieu à des nids de créativité et de liberté où l’interaction avec le bâtiment se réinvente et trouve de nouvelles voies. La fabrique de la ville s’ouvre enfin au grand public.

Une extrême variété d’actions et de projets

L’art et la culture sont à l’honneur bien sûr. Citons par exemple le Shakirail, qui consiste à rénover les abords des voies de chemin de fer de la gare de l’Est dans le 18e arrondissement afin d’y créer des espaces de création artistique pluridisciplinaires. Il est prévu aussi un jardin, des promenades et différentes actions écologiques, ou encore le centre technique municipal de Grigny, transformé en théâtre dans l’attente de sa réhabilitation en salle culturelle. 

Les espaces pop-up, ces concepts éphémères – commerciaux la plupart du temps – trouvent ici un terrain d’expérimentation rêvé : Puma City par exemple. Ce magasin mobile fait de conteneurs industriels recyclés incluant un espace de vente de la marque, un bar et une piste de danse et devient pour quelques semaines un endroit branché en s’implantant dans différentes installations portuaires habituellement peu propices à la détente et à la rencontre. 

Une pépinière de plantes locales a, quant à elle, été installée à Versailles sur le site de construction d’une ZAC. Cela dans le but de disposer des espèces qui seront plantées lors de son aménagement. Mentionnons également les réhabilitations légères des bords de Seine où des activités provisoires viendront préfigurer les usages possibles du site dans le cadre du projet “Réinventer le Seine” à Ris-Orangis. Il ne s’agit là que de quelques exemples parmi les centaines existantes ou à venir à travers la France entière.

Sources des photos : objectifgrandparis.fr / Twitter /