Île Seguin

Shigeru Ban et Jean de Gastines, architectes du nouvel écrin culturel de l’Ouest parisien

Après avoir accueilli une usine Renault de 1929 à 1992, l’île Seguin, d’une surface de 11 hectares située sur la Seine entre Sèvres et Boulogne-Billancourt, a fait l’objet de nombreux projets de réhabilitation. Le conseil départemental des Hauts-de-Seine a finalement tranché en 2013 en faveur de la Seine Musicale, un équipement culturel à vocation musicale. L’impressionnant bâtiment a été conçu par Shigeru Ban, architecte japonais lauréat du prix Pritzker 2014 et Jean de Gastines, architecte français, un duo à qui l’on doit déjà le centre Pompidou à Metz.

Un équipement culturel d’envergure

Inaugurée le 21 avril dernier, la Seine Musicale est un équipement public et culturel de 36.500 m2 dédié à la musique. Ce nouveau pôle culturel a nécessité trois ans et demi de travaux pour un coût de 170 millions d’euros financé par un partenariat public-privé. Le bâtiment aux allures de paquebot se compose notamment de deux salles de concerts. Tout d’abord, la Grande Seine, salle pouvant accueillir jusqu’à 6.000 spectateurs, est dévolue aux spectacles d’envergures tels que les concerts et les comédies musicales.

Le second bâtiment emblématique de La Seine Musicale est son auditorium composé de 1.150 places et dédié aux musiques classiques et contemporaines. Cette salle, signature fétiche de l’ensemble architectural, est reconnaissable par sa forme d’œuf géant dont la coquille, formée par un maillage hexagonal en bois, est recouverte de petits carreaux de céramique vert ou rouge irisé. Protégeant l’Auditorium, une grande voile, faite de panneaux photovoltaïques, a été montée sur rails afin de suivre la course du soleil, faisant de la cité musicale un exemple HQE (haute qualité environnementale). A l’intérieur, entièrement fait de bois, c’est l’impression de “nid“ qui s’impose à l’œil : les murs sont composés d’un tissage de lattes de bois alors que le plafond est fait d’un assemblage de tubes de petites sections de bois, de cartons et de papier.

La silhouette générale de l’ensemble rappelle celle d’un paquebot. La Seine Musicale comporte en outre cinq studios d’enregistrement et de répétition ainsi qu’un lieu d’enseignement et de formation avec la Maîtrise des Hauts-de-Seine (chœur d’enfants de l’Opéra de Paris). Une très longue rue intérieure, bordée de restaurants et de commerces dédiés à la culture, traverse le bâtiment de bout en bout et assure la connexion entre toutes les fonctions. Dehors, un grand jardin de 7.410 m2 recouvre le toit de la grande salle et un écran géant de 800 m2, installé sur le parvis, retransmet les concerts.

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Un duo d’architectes franco-japonais

La Seine Musicale a été co-conçue par l’architecte japonais Shigeru Ban (lauréat du prix Pritzker en 2014) et le Français Jean de Gastines, duo qui a déjà réalisé en 2009 le centre Pompidou à Metz. Cette fructueuse collaboration a permis à la cité musicale d’être récompensée en 2015 par le prix du meilleur projet futur au MIPIM (marché international des professionnels de l’immobilier) à Cannes.

Shigeru Ban et Jean de Gastines sont nés la même année, 1957, le premier à Tokyo, le deuxième à Casablanca. Après des études en économie et histoire à Paris-Sorbonne, Jean de Gastines intègre l’École nationale supérieure des beaux-arts à Paris en 1978, tout d’abord section cinéma avant de bifurquer vers l’architecture pour sortir diplômé en 1984. Durant ses études, l’apprenti architecte se forme dans l’agence californienne de Frank Gehry, à Santa Monica et collabore ensuite avec Aymeric Zublena à Paris.

Dès 1985, Jean de Gastines crée sa société éponyme au sein de laquelle collaborent aujourd’hui huit architectes. Il est l’auteur de stations thermales, de résidences de tourisme et de nombreux chais de vinification. En 2006, il remporte le concours pour la création du nouveau Center Parc de l’Est de la France. Deux ans plus tard, il signe la scénographie de deux expositions du musée du quai Branly. Parallèlement, à partir des années 2000, il s’associe à Shigeru Ban pour tous les projets que l’architecte japonais réalise en Europe.

Shigeru Ban, innovation et humanisme

Shigeru Ban est diplômé de l’Ecole d’architecture de New York et établit son agence en 1985 à Tokyo. Le Japonais est connu pour ses architectures innovantes en carton, permettant l’homologation de ce dernier comme matériau de construction. Shigeru Ban défend une construction légère, peu coûteuse, utilisant des matériaux naturels et met son talent au service des causes humanitaires. Pour venir en aide aux populations, il crée des maisons en tubes de carton après les tremblements de terre de Kobé (Japon, 1995), de Kaysnali (Turquie, 1999) et de Bhuj (Inde, 2001). Il collabore également avec le Haut-Commissariat des Nations unies et aux droits de l’homme (HCDH) en élaborant des abris d’urgence pour les victimes du génocide rwandais. En 2004, la France lui décerne la Grande médaille d’or de l’Académie d’architecture.

Dernier projet commun aux deux architectes, la Seine Musicale vient compléter l’offre culturelle dans la capitale aux côtés de la Philharmonie, du Stade de France, de Bercy, du Zénith, de l’Olympia et des nombreuses autres grandes salles…