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L’urbanisme circulaire, la solution à l’étalement urbain ?

Non, l’urbanisme circulaire ne signifie pas faire des villes rondes ! Mais pour qu’une ville tourne rond, c’est d’abord son processus de fabrication, et la manière dont ses habitants interagissent avec l’environnement construit qui doit fonctionner de manière pérenne. C’est ce que propose entre autre Sylvain Grisot, de l’agence de conseil et d’innovation en urbanisme Dixit.net.

Une ville étalée, une ville écartelée

L’urbanisme circulaire répond à un problème fondamental: l’étalement urbain et son impact. Une tendance très nette que les citoyens de chaque ville d’Europe (et au-delà) a pu voir croître à l’œil nu. Les villes grignotent continuellement les espaces agricoles situés à leur périphérie. Entre 2006 et 2015, les experts estiment que plus d’un demi-million d’hectares ont été artificialisés en France métropolitaine. Ce qui correspond à six fois la surface de Paris chaque année !

Le processus de construction classique dans notre ville se résume en trois étapes. Tout d’abord, l’exploitation de ressources naturelles pour produire un objet comme un immeuble de bureaux, puis l’utilisation (souvent unique) de l’objet, et enfin sa démolition et sa mise en décharge. Le processus se répète en périphérie de la ville, ce qui provoque le fameux étalement urbain, non sans avoir au passage gâché des ressources naturelles, détruit des écosystèmes, enlaidit nos entrées et sorties de villes. Et surtout cela appauvrit les sols pour que finalement ils deviennent des friches urbaines. 

Cette addiction à l’étalement urbain ne date pas d’hier. Il est à la fois la cause et la conséquence de notre dépendance à la voiture. Puisque son utilisation s’est multipliée ces dernières décennies, il semblait plus simple de vampiriser des surfaces agricoles en périphérie de la ville. Mais en repoussant sans cesse les frontières de nos espaces urbains, il devenait obligatoire pour les citoyens d’augmenter l’utilisation de leurs véhicules. La fabrique urbaine est volontairement entrée dans un cercle vicieux qui a forcé ses acteurs à consommer toujours plus de foncier.

Un changement du modèle 

L’objectif de l’urbanisme circulaire est en fait de transposer les principes de l’économie circulaire au processus de fabrication urbaine, en se concentrant principalement sur l’état des sols. Une approche circulaire, contrairement aux processus linéaires, privilégient des boucles de réutilisation, afin d’économiser aux mieux les ressources nécessaires à la fabrication. Les principes clés sont le recyclage, le réemploi, la réparation en continu…

Prenons par exemple à un immeuble de bureaux. Si ce bâtiment n’accueille ses occupants qu’à partir de 8h du matin jusqu’à 17h, le tout uniquement cinq jours par semaine… Cela signifie qu’il n’est utilisé que 45 h par semaine, soit à peine un tiers de sa capacité maximale. Le soir, cet immeuble pourrait servir de lieux de réunions associatives. Imaginons ensuite la même démarche avec les écoles fermées l’été, un restaurant universitaire qui devient un espace de coworking…

Et c’est sans compter l’éventualité probable que le bâtiment en question ne soit tout simplement abandonné par ses occupants. Avec l’urbanisme circulaire, plutôt que de tout simplement déconstruire, il s’agit de trouver de nouvelles utilisations pour rentabiliser au mieux l’espace et les ressources dépensés. 

Le sol, cette ressource qu’on ne peut recycler

Si on peut (en théorie) toujours réutiliser des matériaux de construction après leur premier usage, et même après déconstruction, ce n’est pas le cas pour les sols. Défrichés, bétonnés, dévisagés… les milieux naturels artificialisés perdent leur biodiversité et leurs cycles naturels. Cycles du carbone, d’azote, d’oxygène et d’eau… autant de ressources produites naturellement et qui sont nécessaires à la vie sur Terre. Ni plus ni moins. Et les experts le signalent depuis quelques années déjà, l’importance de ces sols gâchés est cruciale. L’agriculture traditionnelle et l’appauvrissement des sols par l’urbanisme ont déjà montré leurs limites. Pourtant, la population mondiale continue de croître et il faudra bien la nourrir.

Par l’urbanisme circulaire, les citadins du monde entier peuvent se donner les moyens de préserver ce qui peut encore l’être. De reprendre le contrôle de leur propre ville, de la rendre plus harmonieuse, plus pérennes face aux changements climatiques à venir.

Et si la tendance de l’urbanisme circulaire s’accélère, elle n’est pas nouvelle. Projets de déconstructions vertueux, de l’intensification d’usage, de la dépollution dans les villes… grâce à des  pionniers, l’urbanisme circulaire existe déjà en Europe ou encore outre-Atlantique. L’exploit sera de normaliser ce qui est pour l’instant l’exceptionnel.