Redonner au bois sa splendeur
Sous l’impulsion des pouvoirs publics, le bâtiment français multiplie les projets d’immeubles en bois.
Si les Français sont familiers des chalets en bois dans les stations de montagne, ils n’ont pour la plupart jamais vu d’immeubles en bois dans leurs villes. Jusqu’à présent, la construction française d’immeubles se cantonnait en effet au béton et à l’acier. Ce alors qu’en Scandinavie, aux États-Unis ou encore au Japon, le bois est couramment utilisé dans la construction d’immeubles.
Cela est en train de changer. Le ministère du Développement durable vient de débloquer une enveloppe de 5,8 millions d’euros s’inscrivant dans les programmes d’investissement à venir afin de favoriser la construction des immeubles en bois.
Ce n’est pas donc pas un hasard si l’on voit fleurir de plus en plus de projets d’immeubles d’habitation en bois. Le premier immeuble en bois massif construit dans l’Hexagone est un bâtiment de 7 étages géré par le Toit Vosgien à Saint-Dié-des-Vosges. Mais de nombreux autres devraient bientôt voir le jour. Parmi les gros projets en cours, le promoteur Promicea vient d’achever la structure d’un immeuble résidentiel en bois massif à Ris-Orangis (Île-de-France) qui sera livré en septembre prochain à 3F, l’un des plus importants bailleurs sociaux de France. Il proposera 140 logements sur 4 niveaux et sera le plus grand bâtiment résidentiel d’Europe en un seul tenant en bois massif. «3F a une dizaine de réalisations en bois à ce jour. C’est du multi-expérimental, nous testons toutes les solutions”, expliquait Yves Laffoucrière, directeur général de 3F, interrogé par Les Echos en janvier dernier.
Un immeuble en bois à venir à Bordeaux
A Bordeaux, un immeuble de 7 étages en bois sortira de terre début 2018, dans le cadre du projet Euratlantique. C’est le groupe Pichet qui réalise cet immeuble de bureaux, « Perspective », dont la construction vient de démarrer. Lors du concours « Réinventer Paris » lancé par la mairie de Paris, de nombreux projets d’immeuble en bois ont été présentés. A Champs-sur-Marne, la société Arbonis (groupe Vinci) travaille également sur une résidence étudiante en bois.
En incitant à la construction d’immeuble en bois, l’État français espère redynamiser une filière bois qui peine à trouver des débouchés. La part de marché du bois dans la construction de maison individuelle a en effet stagné à 10,4 % entre 2012 et 2014. « Les entreprises sont petites, elles ont de 4 à 5 chantiers par an, certaines commencent à disparaître et si la tendance se poursuit en 2016, on risque de passer sous la barre des 10 % de part de marché», explique Eric Toppan, coordinateur de l’Observatoire économique France Bois Forêt aux Echos.
Un bilan carbone favorable
Par ailleurs, la volonté politique s’exprime aussi dans la nouvelle loi de transition énergétique qui remplacera en 2020 l’actuel RT2012, et devrait favoriser largement l’utilisation du bois, son bilan carbone étant meilleur que celui du béton. Le bois comme matériau de construction utilise en effet moins d’énergie que le béton ou l’acier. Par ailleurs il stocke du CO2. D’où un bilan carbone nettement meilleur que le béton et l’acier.
Les progrès techniques accomplis dans l’assemblage du bois ont rendu possible la construction de grands ensembles. Grâce à la technique du « cross laminated timber » (CLT), ou laminé croisé, l’on peut fabriquer des panneaux porteurs dont la capacité de résistance et de portance permet de dépasser les 15 étages. On peut faire varier les couches de 3 à 7 selon les besoins de portance. Les éléments de bois étant préfabriqués en atelier, la construction est plus rapide que l’équivalent en béton.
Autre argument très attractif pour les architectes, cette fabrication en atelier permet d’intégrer à l’avance les ouvertures, perforations et espaces pour câblage, ce qui permet de gagner ensuite du temps sur le chantier et de limiter les risques d’erreur. Côté sécurité enfin, le bois n’a rien à envier au béton. Il remplit toutes les exigences réglementaires de résistance au feu et aux séismes.
Fort de tous ces arguments, l’immeuble en bois devrait donc faire son entrée dans nos paysages urbains. Seule ombre au tableau, le coût qui reste supérieur d’environ 5 % à celui de la construction en béton.