Le street art traverse l’atmosphère
L’artiste français Invader qui s’était fixé pour mission d’envahir le monde à l’aide de ses petits aliens en mosaïque a franchi une limite jamais atteinte dans l’histoire du street art. Il expose dans… l’Espace !
Personne ne sait vraiment qui il est. L’artiste français Invader, qui apparaît toujours à visage couvert, ou pixélisé, à l’image de ses œuvres, aime à se définir lui-même comme un AVNI (pour Artiste Vivant Non Identifié).
L’exposition qu’il réalise actuellement est d’un genre nouveau. Elle n’est pas ouverte au grand public, étant très peu accessible en transports en commun. Malgré le fait qu’une seule œuvre, grande comme une tablette de chocolat, ne soit exposée, sa mise en place aura durée pas moins de deux ans. Les Space Invaders n’ont plus de limite et s’attaquent à la station spatiale internationale !
Invader, une légende du street art
Vous connaissez sûrement son travail, inspiré d’un jeu vidéo japonais des années 1970. Le principe de base de Space Invaders était de tuer au rayon laser de méchants aliens composés chacun de quelques carrés de couleur (qualité graphique de l’époque oblige).
Le contemporain de Pac-Man est passé grâce au street art dans une autre dimension. L’artiste français reprend ses personnages à son compte, remplaçant les pixels par des carreaux de mosaïque, et cimentant chaque protagoniste sur les murs de lieux publics, comme pour leur donner une existence plus tangible et brouiller les frontières entre réel et virtuel. Les aliens de l’artiste Invader ne disparaitront pas en débranchant votre Atari. Ils sont sortis du monde éphémère du jeu-vidéo. L’invasion est préparée et exécutée avec minutie sous le nom de code « Space Invaders ».
Un space invader retourne dans l’espace
Après avoir envahi le monde, le street art d’Invader a quitté la rue, la ville et même l’atmosphère, pour être exposé dans l’endroit habité par l’Homme le plus lointain, la Station Spatiale Internationale.
L’une de ses œuvres, « Space2 », a été confiée l’an dernier à l’Agence spatiale européenne, qui l’a menée tout droit dans l’espace, au sein de la mythique ISS. Après avoir flotté quelques temps, elle a été installée dans le laboratoire européen Colombus et fixée au-dessus d’une écoutille.
Dans l’espace, le manque de gravité rend tous les actes du quotidien plus complexes. S’alimenter, faire sa toilette, ou encore dormir nécessite une adaptation particulière. La première exposition artistique spatiale fut le fruit de deux ans de travail. Des solutions techniques ont dû être trouvées à la fois pour rendre l’œuvre stérile et éviter la propagation de bactéries venues de Terre, mais également pour éviter la propagation de poussières en cas de bris de la mosaïque, qui pourraient être très facilement inhalés en apesanteur et représenter un danger potentiel pour les résidents de la station.
Le street art, un art sans frontières
Comme son nom l’indique, Invaders veut envahir l’espace public. En faisant de la rue son lieu d’exposition, il offre son art à tous. Et c’est justement cela qui fait le street art. Faire de n’importe quel endroit un lieu d’exposition artistique, c’est l’essence même de cette forme d’art. Graffer un mur, customiser un panneau de circulation, une bouche d’égout ou une coquille d’escargot, c’est transformer en art ce qui ne l’était pas.
Après avoir exposé ses œuvres à travers le monde, dans les rues d’Europe, d’Afrique, d’Asie et d’Amérique, Invader va voir l’une de ses œuvres flotter à 250 kilomètres d’altitude. Mais « Space2 » n’est en fait pas le premier Invader à avoir entrevu les limites de l’atmosphère. Son grand frère « SpaceOne » avait atteint en 2012 l’altitude de 35 kilomètres, alors transporté par un ballon sonde gonflé à l’hélium.
En plus de réaliser un rêve d’enfant, l’artiste accomplit une prouesse artistique, repoussant les limites du street art dans un lieu jusqu’à présent inaccessible. Lui qui prend plaisir à se rendre incognito à ses propres « expositions » aura-t-il le privilège de voir son œuvre flotter en apesanteur ?