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Biofaçades, un test grandeur nature à Saint-Nazaire

En se promenant à Saint Nazaire, on pourra bientôt voir déployer sur une partie des murs de l’incinérateur Alcéa, une façade verte étrange : une biofaçade. Déployées à grande échelle sur un site industriel de la ville bretonne, ces biofaçades à micro-algues révolutionnaires pourraient changer le paysage urbain.

Le procédé est simple ! Composé de serres verticales, de l’épaisseur d’un triple vitrage, dans lesquelles prolifère du phytoplancton, ce dispositif permet de réguler la température d’un bâtiment et de cultiver des micro-algues.

La température des micro-algues restant constante, entre 18 et 20°c, la régulation thermique se fera donc aussi bien en été qu’en hiver, permettant une économie de 50% sur les dépenses énergétiques. La teinte verte de ce type de façade jouera aussi le rôle de pare-soleil en été. De plus, les micro-algues seront régulièrement récoltées pour être par la suite transformées. La symbiose avec l’usine est totale, puisque les rejets de Co2 ainsi que la chaleur produite par l’incinération des déchets seront réinjectés dans le circuit, favorisant la croissance des organismes.

L’aboutissement d’un partenariat

Fruit d’une association entre plusieurs partenaires, ce projet, baptisé SymBio2, a été lauréat de l’appel à projets du Fonds Unique Interministériel, récompensant les idées à caractère innovant. Remportant ainsi un financement de 1,7 millions d’euros, le reste des 4,9 millions d’euros nécessaires a été financé par les différents partenaires ainsi que par des subventions de la Région Pays de la Loire, la Région Ile-de-France, et la Ville de Paris.

Plusieurs acteurs forment le consortium ayant abouti à la mise en œuvre de SymBio2 : outre le groupé Séché Environnement, le cabinet d’architecture XT-U, à qui l’on doit l’invention des biofaçades, l’OASIIS, un cabinet d’études spécialisé dans le thermique, mais aussi un groupe de recherche, le GEPEA.

Une première en France

Les résultats de cette implantation permettront de promouvoir ce nouveau procédé qui, s’il remplit toutes ses promesses, constituera une innovation majeure. En tirant pleinement profit des échanges thermiques avec le bâtiment hôte, et si les micro-algues parviennent à être converties en source d’énergie, ces biofaçades pourraient rendre possible l’apparition d’édifices à énergie zéro, c’est-à-dire se suffisant à eux-mêmes. Et pourquoi pas, dans un proche avenir, produire un surplus, devenant ainsi des constructions à énergie positive. Une start-up française, Ennesys, développe de son côté un projet allant dans ce sens.

Des micro-organismes à fort potentiel

Mais les bénéfices ne s’arrêtent pas à l’isolation thermique : en effet, les micro-algues ainsi produites seront récupérées et pourront être réutilisées. Leur utilisation ouvre des perspectives plus que prometteuses. De par leur richesse en protéines, lipides, vitamines et antioxydants, ces micro-organismes peuvent être utilisés en tant qu’ingrédients naturels pour l’alimentation, la santé et la cosmétique. Des recherches sont aussi en cours sur leur transformation en algocarburants, qui promettent un rendement jusqu’à dix fois supérieur aux agro-carburants traditionnels, tout en étant plus simple à cultiver. Et seule une infime variété de micro-algues a été étudiée à ce jour, parmi les milliers existantes.

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Nouvel « or vert » et forte croissance économique

Les perspectives liées aux biofaçades sont encourageantes, le secteur des bâtiments à faible impact environnemental étant en plein essor et attirant des capitaux toujours plus élevés. Encore à ses balbutiements, cette technique sera à terme déclinée en configurations pour les usines, les bureaux, et les habitations, permettant la naissance de véritables éco-quartiers. Le succès du procédé offrira aussi des débouchés et relancera la filière algocole, qui nécessite des coûts d’investissements importants. La recherche française, qui figure parmi les pionnières de ce secteur, entend bien exporter son expérience sur le marché mondial, et asiatique en particulier.

Capteur solaire biologique, isolant thermique, production de micro-algues aux intérêts multiples, nul doute que, si les essais s’avèrent concluants, les prochaines années verront fleurir ce type de façades révolutionnaires.