Ville Post Covid Urban Attitude

Quelle ville après la pandémie?

L’histoire de l’urbanisation a toujours été étroitement liée à celle des grandes épidémies. Le coronavirus, par sa facilité à se transmettre, pourrait impacter profondément les transports, la polarisation à outrance des villes et l’attrait même des mégalopoles.

Repenser les transports

Les transports en commun, en ces temps de distanciation sociale, sont bien sûr considérés avec une méfiance redoublée. La perspective d’aller s’agglutiner dans une rame de métro, encerclé par de potentiels porteurs du virus, et de s’agripper à une rampe recouverte de centaines de germes hétéroclites n’a rien de séduisant. La voiture et son cocon apparemment hermétique sont la première réponse à cette problématique. Mais l’engorgement routier déjà excessif de nos métropoles avant la pandémie fait de cette solution une impasse. 

Restent le vélo et la marche à pieds. Nos villes s’étant organisées autour de l’automobile depuis 1945, il est désormais indispensable de repenser nos réseaux routiers pour faire une vraie place à ces modes de déplacement doux, et de nombreuses mesures sont actuellement prises dans cette optique. La création de pistes cyclables et de zones piétonnes semble s’imposer, mais est concrètement difficile à mettre en place. 

L’urbanisme tactique, consistant à moduler de façon provisoire et très réactive le paysage urbain, déploie des solutions inventives partout dans le monde depuis plusieurs années déjà et pourrait s’imposer comme un système durable. 

La remise en question de l’ultra-polarisation

La civilisation de la voiture a occasionné une polarisation fonctionnelle extrême de nos villes : il y a des quartiers d’habitation, ceux où l’on travaille, ceux où l’on fait ses courses et ceux pour les loisirs et le « bon temps ». L’uniformité globale des horaires de ces occupations dans la population et leur concentration géographique a donné lieu aux problèmes déjà évoqués : engorgement routier, transports publics surchargés. 

Si les modes de déplacements doux peuvent avoir une chance de s’imposer, cela doit forcément passer par une évolution de ces structures urbaines polarisées, qui placent les différentes fonctionnalités de la ville à des distances importantes les unes des autres, difficilement praticables en vélo ou à pied. 

Les réflexions urbanistiques actuelles se penchent ainsi sur les façons de redonner une mixité fonctionnelle aux différents quartiers des villes. Paris et d’autres villes dans le monde travaillent ainsi sur le concept de “ville à 15 minutes”, dans lesquelles on trouverait à proximité de chez soi son lieu de travail, des commerces, des services et des loisirs. 

Une telle vision peut sembler utopique, mais la pandémie pourrait catalyser une telle évolution : le télétravail, l’utilisation accrue des commerces de proximité, l’apparition d’espaces de coworking, la revitalisation des friches de tous ordres sont autant de leviers dans ce sens.

Les villes moyennes, la solution?

Les villes moyennes de province semblent déjà répondre à nombre de ces problématiques. Elles échappent à l’hyper densité des métropoles, facteur évident de propagation virale, les temps et distances de parcours s’y trouvent fortement réduits, et la majorité des services y sont encore présents. 

C’est en outre une évolution sociétale déjà largement entamée avec la rurbanisation des années 90-2000, qui devrait s’accentuer suite à la pandémie. Reste que cette évolution n’est possible que pour une faible partie de la population. 

Si les grandes villes sont aussi peuplées, c’est parce qu’elles génèrent de l’emploi dont une faible proportion est aujourd’hui exportable dans les villes moyennes. Les estimations des Nations unies prévoient d’ailleurs une poursuite du grossissement des mégalopoles d’ici 2050. L’exil provincial pourrait bien demeurer un luxe réservé à une faible minorité.

Photos : slate.fr et lepointeur.ca