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Poules, abeilles, brebis… Pas facile d’élever des animaux en ville !

D’ici 2050, 75 % de la population mondiale habitera en ville. Aujourd’hui c’est déjà plus de la moitié des habitants du monde qui évolue dans un centre urbain, devant s’y déplacer, travailler, dormir et surtout s’alimenter. L’autonomie alimentaire des villes est largement mise en question. Paris possèderait une autonomie alimentaire d’à peine quatre jours. De nombreux projets se sont ainsi développés en maraîchage urbain : fermes urbaines hors sol, en hydroponie, en containers, sur les toits ou dans les jardins partagés. Mais pour aller encore plus loin sur le terrain de l’agriculture urbaine des entreprises de l’économie sociale et solidaire imaginent l’élevage urbain et conçoivent des poulaillers pour balcons ou des ruches individuelles. Associations de protection des animaux, voisins, professionnels questionnent ces nouvelles pratiques.

Animaux de la ferme : bienvenus en ville !

En matière d’élevage urbain et individuel, le continent nord-américain est pionnier en la matière. Au Canada, de nombreux projets d’élevage urbain ont vu le jour, certains y ont adossé un projet de réinsertion sociale à l’instar du partenariat à Montréal entre l’association Accueil Bonneau et l’entreprise Alvéole spécialisée en installation de ruches auprès des entreprises, des écoles et des particuliers. Idem à Paris qui comptait lors du recensement de 2015 plus de 700 ruches. En région parisienne, des coopératives de bergers font paître leurs brebis aux pieds des immeubles. À Bagnolet par exemple la bergerie de Gilles Amar est en négociation avec la municipalité pour un nouvel espace incluant un jardin pédagogique. Difficile de devenir berger urbain et de s’improviser éleveur de brebis et producteur de fromages en pleine ville, mais de nombreux citadins sont toutefois tentés d’accueillir chez eux sur leur balcon ou dans leur petit jardin des poules pondeuses.

Une réglementation encore floue

À Montréal, l’arrondissement de Mercier-Hochelaga-Maisonneuve autorise la présence de poules sur son canton depuis l’été 2015. Une première ! En France il n’existe aucune réglementation en ce qui concerne les poulaillers urbains, aucune autorisation stricte ni aucune interdiction précise. Ce vide juridique peut être considéré comme une aubaine pour les vendeurs de poulaillers mobiles. Le canadien Poc Poc est l’un d’entre eux.

L’entreprise vend des petits poulaillers et fournit les poules pondeuses ainsi que les graines bio et livre partout dans le monde. Pour le fondateur Alex Mclean, adopter une poule est moins contraignant que s’occuper d’un chien et surtout une poule peut pondre jusqu’à 14 œufs par semaine. En Picardie, Aurélie Deroo la fondatrice de Cocottarium, un poulailler installé dans le jardin partagé de Neuville-sur-Oise, explique qu’un poulailler est un bon moyen pour recycler les déchets organiques, car en moyenne une poule peut consommer entre 150 et 200 kg de déchets par an.

Complications et plaintes

Mais même si les poules sont plus dociles que les brebis, les contraintes sont nombreuses pour les citadins. Nuisances sonores d’abord, parce que les poules caquettent même si elles ne chantent pas aussi fort que les coqs. Autre inconvénient : les déjections odorantes. Un nettoyage quasi quotidien du poulailler est donc conseillé lorsque l’on habite en pleine ville. L’entreprise Poc Poc incite même ses clients à inviter ses voisins pour les amadouer et leur offrir des œufs frais de temps en temps. Certaines municipalités craignent la multiplication des bactéries et autres grippes aviaires, d’autant que les fientes de poules attirent également les rats. De leur côté, les associations de protection des animaux relèvent une recrudescence des abandons de gallinacés dans les villes et surtout des jeunes coqs. À Miami des milliers de poules et coqs ont été capturés entre 2003 et 2009.

Un accompagnement professionnel obligatoire

En France on conseille donc aux éleveurs urbains de prendre rendez-vous avec un spécialiste ou de rejoindre une association ou une ferme pédagogique gérée par des professionnels. Il existe notamment en France le GDSA (groupement de défense sanitaire des abeilles), un groupe de professionnels en mesure d’accompagner les particuliers cherchant à installer une ruche sur leur toit ainsi que de nombreuses structures offrant des formations aux apprentis apiculteurs. Même chose pour les poulaillers urbains avec les conférences organisées par la Ferme de Paris installée dans le Bois de Vincennes. Parce que ce qui fonctionne pour un potager ne fonctionne pas pour un poulailler ou une ruche…