Les couvreurs parisiens rêvent de voir leur artisanat au patrimoine mondial de l’UNESCO
Les couvreurs parisiens, dont le métier tend à se perdre à cause des dures conditions de travail, rêvent de la reconnaissance de leur artisanat. Appuyés par le photographe Gilles Mermet, qui a mis en lumière leurs travaux, ces « virtuoses du zinc » souhaitent désormais voir leur métier inscrit au patrimoine mondial immatériel de l’UNESCO. Mais la route est encore longue.
Il n’est rien de plus authentique que de pouvoir observer les toits de Paris en s’exaltant de la beauté de ce paysage urbain. Cet « océan gris », carte postale immortelle de la Ville Lumière résulte du travail délicat des artisans dédiés à ce travail. On les appelle les couvreurs plombiers (ou couvreurs zingueurs), « pourtant à tort », explique Nicolas Dias, passé maître dans la profession. En effet, si jadis les artisans travaillaient sur les toits en été et à l’intérieur l’hiver, maniant les deux métiers, ils sont désormais tout à fait distincts.
Un artisanat fin et reconnu
Apparu au début du XIXe siècle, le métier de couvreur s’est fortement développé durant les grands travaux haussmanniens du milieu du siècle. Le zinc utilisé était peu cher, résistant et facile à travailler. Ce matériau, régulièrement rénové par les couvreurs (tous les 50 ans) a ainsi donné son immortalité à la ville de Paris.
Aujourd’hui, que ce soit sous un soleil de plomb ou des pluies diluviennes, ces funambules urbains travaillent avec finesse et passion. Ils sont au total environ 500 à œuvrer sur les toits de Paris. Chacun, dit-on dans le métier, possède sa petite signature, ce petit détail que les autres pourront reconnaître à coup sûr. « Je réalise toujours mes renvois d’eau en forme de tulipe » ajoute Nicolas Dias. Le métier de couvreur est éprouvant et très physique, mais il a aussi fortement évolué en deux cents ans d’existence, notamment en ce qui concerne les normes de sécurité. Cependant, « le travail reste très traditionnel » affirme Angel Sanchez, le président du syndicat des entreprises de Génie Climatique et de Couverture Plomberie (GCCP).
Vers une quête de reconnaissance
Les couvreurs veulent être reconnus pour ce qu’ils sont, à savoir des artisans avant tout. Aujourd’hui, trop de monde assimile le métier à une simple branche du bâtiment. La rudesse physique du métier explique aussi en partie le manque de nouvelle main-d’œuvre parmi la jeunesse. C’est pour ces raisons que les couvreurs s’emploient à faire reconnaître ce patrimoine historique et architectural.
Il fait officiellement partie de l’inventaire des biens culturels immatériels français depuis le 27 juin 2017. Une première étape de franchie. Désormais, les couvreurs souhaitent inscrire leur artisanat au patrimoine mondial immatériel de l’UNESCO. Appuyés par le photographe Gilles Mermet, qui a mis en lumière leurs travaux dans un ouvrage intitulé « Les toits de Paris ou l’art des couvreurs » (publié aux éditions de la Martinière) ainsi que par la maire du IXe arrondissement de Paris, Delphine Bürkli, les couvreurs mettent de grands espoirs en cette requête qui s’inscrit parfaitement à la convention de l’UNESCO de 2003 au titre de « savoir-faire liés à l’artisanat traditionnel ».
Des freins au projet
Si les couvreurs espèrent inscrire un jour leur artisanat sur les listes de l’UNESCO, ils rêvent également dans un avenir proche de faire reconnaître au patrimoine matériel cette fois-ci, les toit de Paris eux-mêmes. Mais à chaque requête s’ajoute un frein auxquels les couvreurs devront faire face.
Tout d’abord, les demandes d’adhésion sont nombreuses et fastidieuses. En effet, les couvreurs de Paris devront attendre 2019 afin d’envisager d’entrer au classement et se verront être mis en concurrence avec d’autres savoir-faire traditionnels. En ce qui concerne la reconnaissance des toits de Paris, les militants devront se confronter à un problème similaire, celui des quotas par ville. En effet, Paris possède déjà les berges de Seine classées depuis 1991 à l’UNESCO.
Dernière ombre au tableau et non des moindres, la maire de Paris Anne Hidalgo a fait part de ses réserves quant à ce projet. En effet, il entre en opposition directe avec son dessein de végétalisation des toits de Paris.
Ainsi, les toits de la capitale et leurs couvreurs verront passer encore quelques saisons avant d’être inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO. Cette protection patrimoniale pourrait ainsi figer pour toujours les toits de Paris dans l’éternel gris de leur zinc.