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Bill Viola s’expose au Grand Palais

Comment rester insensible aux images de Bill Viola, à son univers si personnel et pourtant universel, ainsi qu’aux questions qu’il soulève ? En déambulant dans la nef du Grand Palais, ce ne sont pas seulement des images en mouvement qui assaillent le spectateur : ce sont aussi des sons, des visages, des murmures, des interrogations. Une expérience. Une initiation.

Parmi les nombreuses œuvres produites durant la carrière de Bill Viola, 20 pièces ont été sélectionnées par les commissaires de l’exposition, Jérôme Neutres et Kira Perov, compagne et complice de l’artiste. Couvrant une période allant de 1977 à nos jours, la sélection fait la part belle aux œuvres les plus représentatives de l’artiste, de ses obsessions, de ses thèmes de prédilection. Une cinquantaine d’écrans, sept heures de projection, une immersion invitant le spectateur à un véritable voyage métaphysique.

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Pionnier de l’art vidéo

Agé de 63 ans, Bill Viola, originaire de New-York, étudie d’abord la musique électronique, tâte de la publicité, avant de tenir en main sa première caméra vidéo, en 1970. Une révélation pour cet artiste épris de spiritualité, et qui cerne d’emblée les possibilités offertes par cet outil. Toutes ses préoccupations, tous ses centres d’intérêt passeront alors par ce média, ce médium dont il tente depuis d’explorer toutes les facettes. Devenant l’assistant de Nam June Paik, autre grand vidéaste, il entame sa carrière personnelle dès 1973, acquérant très vite une renommée mondiale d’artiste culte.

Révélation

Alors qu’il est âgé de six ans, l’artiste côtoie la mort de très près. Se baignant dans un lac, il manque se noyer et est sauvé de justesse par son oncle. Cette expérience fondatrice le marquera à vie et constituera un « traumatisme positif » déterminant dans son travail à venir. Et nous révèle au passage un aspect de la personnalité de Bill Viola. « Mais pendant cette noyade, je n’ai  eu aucune peur, et j’ai même eu une sensation de bien-être. J’aurais bien pu rester là longtemps, et être très heureux. J’ai vu le monde le plus beau de toute ma vie. ». Cette expérience explique en grande partie la récurrence, dans son œuvre, de l’élément aquatique.

Voyage spirituel

Cet esthète assoiffé de philosophie fait cohabiter dans son panthéon Socrate avec Maître Eckhart, et Schopenhauer avec William Blake. Sans oublier le bouddhisme zen, rencontré au cours d’un voyage au Japon en la personne de maître Daien Tanaka, et dont l’enseignement le marquera profondément. « C’est un mystique de toutes les cultures », déclare Jérôme Neutres. Autre thème majeur de son œuvre : le temps. Filmées avec un nombre d’images par seconde supérieur à la vitesse de projection, puis projetées à la vitesse normale, les créations de l’artiste insufflent une atmosphère irréelle et remettent en question notre mode de vie. « On nous dit de tout faire très rapidement. Les gens ignorent après quoi ils courent : après leur mort ! Le moment présent est ce que nous avons de plus précieux »[ii]. Et il en va ainsi de chaque œuvre de Bill Viola, soulevant des questions existentielles, sur l’apparence, la transmission, l’évolution, le mouvement, la vie, la mort.

Un artiste sous influence

Mais la spiritualité et la philosophie ne sont pas les seules influences de Bill Viola, puisqu’il s’intéresse aussi de très près aux œuvres des grands peintres européens, avec une prédilection pour les maitres de la pré-Renaissance. Andrea di Bartolo, Mantegna, Giotto, mais aussi Bosh ou Goya ont influencé le travail du vidéaste de manière parfois très directe, comme dans The Sleep of Reason et Catherine’s Room, deux créations exposées au Grand Palais. D’autres œuvres clés de l’artiste sont aussi présentées au public, Fire Woman, The Dreamers, ou encore Heaven and Hearth, pour ne citer qu’elles.

Une première en France

L’exposition du Grand Palais est non seulement la première en France à être consacrée à cet artiste, mais aussi la plus grande jamais organisée mondialement. Des rencontres, conférences et discussions sont programmées certains mercredis afin de débattre autour du travail de l’artiste. Un artiste dont l’actualité parisienne est décidément chargée, puisque l’Opéra Bastille programme jusqu’au 4 mai une représentation de Tristan et Isolde, mise en scène par Peter Sellars et illustrée par les vidéos de Bill Viola. De quoi contenter les admirateurs de ce vidéaste passionné et passionnant.

Bill Viola au Grand Palais du 5 mars au 21 juillet 2014.