De nouveaux talents pour les villes intelligentes
Une ville intelligente, ou smart-city, c’est d’abord une ville conçue et gérée avec intelligence. Et si les nouvelles technologies sont au cœur de ce concept, elles ne sont rien sans les hommes pour les concevoir, les mettre en place, et les faire vivre. Pour le bénéfice de tous et d’abord de ceux qui y vivent ou y vivront.
« Lyon Métropole intelligente », projet pilote de smart-city en Europe, définit ainsi les critères d’une ville intelligente. C’est une ville qui doit « prendre en compte les enjeux environnementaux et les contraintes énergétiques, favoriser le fonctionnement en réseaux des collectivités, des citoyens et des entreprises, favoriser la participation des usagers à la conception des services, et enfin intégrer les nouvelles technologies. »
Projet ambitieux car il implique l’éducation et la formation tant des usagers-habitants, que des collectivités et des entreprises. Ainsi que l’explique au Journal du Net Jean-Louis Missika, adjoint à la mairie de Paris en charge de l’urbanisme : «Si vous voulez avoir une ville numérique maîtrisée, il faut que les citoyens qui y habitent maîtrisent le numérique. »
Des chefs de projets smart city
Les villes auront besoin de gestionnaires de projets smart-city, qui comprennent l’ensemble des nouvelles technologies et sont ainsi à même de conseiller les élus et de suivre les projets. « C’est un changement culturel majeur pour les mairies, qui voulaient autrefois tout faire par elles-mêmes », explique Christian Tordo, adjoint au maire de Nice. Et les élus ont tout intérêt à se faire assister de personnes compétentes, pour bénéficier des possibilités d’optimisation des coûts liée à une gestion intelligente des ressources et des infrastructures.
Une autre ressource-clé sera le « IoT adviser » ou conseiller sur l’Internet des objets. L’IoT adviser est un spécialiste des objets connectés, objets équipés de capteurs connectés au réseau par des systèmes sans fil et permettant des mesures des échanges de données. Ces spécialistes auront pour mission, grâce à leur connaissance des dernières innovations technologiques et à leur étude des besoins de la ville, d’imaginer des solutions pour optimiser les services.
Conseillers, techniciens, et designers IoT
La mise en place de ces réseaux d’objets connectés, avec capteurs intégrés aux équipements des smart-cities, nécessitera elle-même des compétences nouvelles. « Nous aurons besoin d’installateurs spécialisés dans l’IoT avec une très bonne maîtrise de la logistique des objets connectés », affirme Pierre Bonzom, P-DG d’ELA Innovation, spécialiste montpelliérain de la technologie de géolocalisation RFID (radio frequency identification). Selon lui, il manque aujourd’hui également un autre niveau de compétence, une sorte de « cartographe de l’objet connecté » qui soit capable de concevoir l’ensemble d’un réseau de capteurs et assurer un maillage sur la zone concernée.
L’intégration de ces capteurs intelligents aux bâtiments et aux équipements urbains se répercutera aussi sur le BTP. Ainsi que l’explique Marie-Françoise Guyonnaud, responsable pédagogique du MBA smart city et management des éco-quartiers à l’institut Léonard de Vinci, les villes devront faire appel à des coordinateurs BIM (Building Information Modeling) pour gérer au mieux cette intégration à toutes les étapes de la construction.
Ces technologies d’objets intelligents peuvent être intégrés à de multiples niveaux de services comme : la régulation du trafic routier, l’automatisation de l’entretien et de l’arrosage des parcs et jardins publics, l’éclairage de la ville, les services de ramassage des ordures ménagères, les systèmes d’alarme et de sécurité etc.
Des citoyens impliqués
Nombre de ces applications ont vocation, non seulement d’optimiser la gestion de la ville, mais également de faciliter son usage aux citoyens. Ils devront pouvoir accéder aux données collectées par le réseau, par exemple pour surveiller le niveau de pollution dans leur quartier, ou encore trouver une place de parking. Il faudra donc des IoT designers pour concevoir des terminaux sous forme d’écrans tactiles à destination du public.
Mais cette ville intelligente, au-delà de la création de nouveaux métiers, va surtout obliger les différents acteurs à collaborer. Collectivités locales, citoyens, entreprises devront travailler en synergie pour inventer et faire vivre ce réseau.
Le projet de smart-city de la ville de Rennes, mené par le LabFab (laboratoire de fabrication numérique de Rennes), met l’accent sur l’appropriation collective des techniques et les interactions. Le laboratoire met à disposition du public, dans quatorze lieux de la métropole (maisons de quartiers, écoles), des machines pilotées par ordinateur pour concevoir et réaliser des objets (connectés ou non). S’y côtoient des étudiants, des industriels, comme des chercheurs. «Nous devons aider les citoyens à s’impliquer dans la transformation de la ville vers sa version smart. » explique Norbert Friant, responsable du service Aménagement et usages du numérique à Rennes Métropole.
Car l’habitant-citoyen de nos futures villes intelligentes sera acteur interactif de cette ville. Presque un nouveau métier.