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Brésil : Un graff symbolise la révolte de la rue contre le Mondial 2014

La coupe du monde de football 2014, dont le coup d’envoi sera donné dans quelques jours, est loin de faire l’unanimité auprès du peuple brésilien. Dans la rue, la colère gronde, et de nombreux Brésiliens sont révoltés par les sommes faramineuses englouties dans l’organisation de cette manifestation alors qu’une grande partie de la population vit encore dans l’extrême pauvreté.

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Facebook de Paulo Ito, DR

Cette révolte est symbolisée par un graff, œuvre de l’artiste de rue Paulo Ito, qui fait le buzz sur Internet et les réseaux sociaux. Il représente un enfant rachitique, avec dans son assiette, en guise de repas, un ballon de football. Tout est dit. D’un côté la pauvreté d’un peuple qui crie famine, de l’autre les dépenses somptuaires engagées pour l’organisation de la compétition, soit 11 milliards d’euros.

Ces dépenses, incluant la mise en place des infrastructures et des transports,  avaient été évaluées à 3 milliards d’euros en 2007, date de la sélection de la candidature brésilienne. Elles ont été quasiment multipliées par quatre depuis.

Une large diffusion sur les réseaux sociaux

Cette révolte n’est pas nouvelle. Il y a un an déjà, de nombreuses manifestations avaient eu lieu dans toutes les grandes villes du pays, rassemblant 350.000 personnes, surtout des jeunes.

L’artiste pour autant ne s’adresse à personne en particulier. Il se fait le porte-parole de ceux qui ont faim et qui n’ont pas les moyens de se faire entendre. L’artiste s’est d’ailleurs élevé contre la récupération de son dessin par la page Facebook TV Revolta, une page très populaire au Brésil qui l’a utilisé pour attaquer la présidente du Brésil Dilma Roussef.

Le street-art outil de contestation sociale

Paulo Ito a publié ce graff sur sa page le 13 mai dernier, et sa publication par TV Revolta, suivie par 3,5 millions d’abonnés, lui a permis de se propager très vite et de se répandre dans le monde entier via Twitter ou Facebook.

Au Brésil, le street-art est omniprésent, particulièrement à Sao Paulo qui compte de nombreux artistes de rue. Il est un outil important d’expression populaire et de contestation politique. L’artiste avait d’abord prévu de graffer à l’entrée du stade Itaquerão qui doit accueillir le match d’ouverture du 12 juin (Brésil-Croatie). Il a finalement choisi de le faire dans le cadre d’un festival de street-art, à l’entrée d’une école de Pompeia, quartier de classes moyennes.

Un autre dessin, dans le même esprit, et peint sur la route, circule aussi sur les réseaux sociaux. Et d’autres ne devraient pas manquer de surgir. « Je ne répète jamais une idée mais je réfléchis sérieusement à faire une exception pour celle-là. » a écrit Paulo Ito, interrogé par le Nouvel Observateur.

« On a besoin de nourriture, pas de football »

L’artiste a tiré son inspiration d’une peinture réalise en 2013 par l’artiste français Goin à Athènes. Elle représentait un enfant noir,  la peau sur les os, un ballon à ses pieds, avec écrit: « On a besoin de nourriture, pas de football ». « Je ne cherche pas à dire que personne ne fait rien contre la pauvreté. Mais le monde et la société brésilienne doivent savoir que la situation n’est pas bonne » explique l’artiste au magazine Slate.

Paulo Ito et son graff nous rappellent que l’art possède une force d’expression puissante. Et que ceux qui, à l’instar de Michel Platini, voudraient occulter la réalité des problèmes sociaux le temps du Mondial 2014, ne peuvent pas empêcher la rue d’exprimer sa colère et son désarroi.